Vilhet, Albin (1896-1981)

1. Le témoin

Né le 11 octobre 1896 à Nyons dans une famille de cultivateurs catholiques. Il obtient le certificat d’études primaires. Il restera cultivateur. Mobilisé au 4e Génie de Grenoble en août 1916. Il part pour le front en juillet 1917. Survivant, il abandonne ses idées religieuses, choqué par le thème de la guerre comme moyen de régénérer l’humanité développé par certaines autorités catholiques. Il milite à l’ARAC et au parti communiste. Il est mort à Nyons en 1981, dans la ferme où il était né.

2. Le témoignage

Albin Vilhet a laissé à sa fille des « Mémoires » sur cahiers d’écoliers et les 356 lettres qu’il avait écrites à ses parents pendant la guerre. Des extraits de celles-ci sont publiés dans Je suis mouton comme les autres. Lettres, carnets et mémoires de poilus drômois et de leurs familles, présentés par Jean-Pierre Bernard et al., Valence, Editions Peuple Libre et Notre Temps, 2002, p. 329-340.

3. Analyse

Arrivant à la caserne en période des gros travaux agricoles, il s’enquiert de ce que font ses parents ; il les informe que les copains « du pays » se rencontrent au café de Nyons. La formation au Génie est plus longue que dans l’infanterie car il y a des techniques à apprendre, par exemple la construction d’un pont sur l’Isère.

En février, puis en avril 1917, il signale le tapage et les violences de ceux qui doivent partir pour le front ou pour Salonique sans avoir obtenu de permission. En juin, il décrit les grèves, en particulier celle des tourneuses d’obus qui passent dans la rue avec un drapeau rouge.

Aux armées à partir de juillet 1917, il évoque surtout les bombardements, en particulier les effets des gaz. En 1918, la guerre de mouvement reprend. On se déplace beaucoup et on vit sur le pays : « Lorsqu’on a été installé, on a été faire un tour dans le village pour voir si rien ne traînait et nous avons trouvé de tout. On charriait les tonneaux de pinard à pleines charrettes. Pour ma part, j’ai pris 4 poules et 4 lapins qu’on va manger ce soir à l’escouade, et une petite chèvre que je vais traire et garder pour boire le lait tous les matins » (15 juillet 1918). Cette chèvre bien utile, il refuse de la vendre 25 francs, puis il la cède pour 20 francs à « une pauvre femme qui en a besoin » avec ses six enfants.

Après l’armistice, « ce n’est pas le travail qui manque à présent, car les ponts sont tous sautés et il faut les refaire en vitesse ». La démobilisation n’est pas pour tout de suite, mais « enfin, à présent que les obus ne tombent plus, tout ça n’est rien ».

Rémy Cazals, juillet 2008

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